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L'AVANT-SCENE n°808 - 1985
L'AMANDIER - 2005


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La construction dramatique de ce récit d’une vie est particulièrement habile. Louise Doutreligne n’élude rien, ne craint rien, pas même les clichés, elle les dissout dans le feu et nous offre quelque chose de la mystérieuse vérité : être femme, être sainte, vivre. La mise en scène de Jean-Luc Paliès est simple, grave, nourrie d’une sorte d’innocence lumineuse.

Armelle Héliot - LE QUOTIDIEN DE PARIS

 

Le Chevalier de L’extase ! La pièce écrite à partir des textes de Thérèse d’Avila est découpée en sept tableaux... c’est un anti-Don Quichotte féminin... une femme déconcertante dont le tempérament en fait un merveilleux caractère de théâtre !

Marion Thébaud - LE FIGARO

 

Louise Doutreligne théâtralise superbement par le travail savant des inclinaisons de tête, pliures du poignet, plissement de voile, cette passion dite mystique qui habita la sainte.

Bernadette Bost LE MONDE

 

...

Ecrire pour dire celle-là qui se saisit de Dieu par tous les bords, dans sa configuration marbrée autant que dans sa négation blanche où son irradiante apothéose. Pour Teresa d'Avila le théâtre des opérations, c'est le monde. La terre où se traduit le désir de chevalerie d'une mystique musclée.

Près de cinq cents années après, Louise Doutreligne propose au monde par les bouches ouvertes d'un théâtre qui traduit la vie, la vision prenante, surprenante d'une brutale présence, celle d'une femme en sainte dans le champ obscur de nos (d') énonciations contemporaines. On pourra assister alors au lever de drapés sur cette écriture et ses sources (l'évidence d'écrire, l'ordre d'écrire) et sur son équation : le corps précède, le corps procède et joue (jouis) de cette procédure : théâtre.

François-Denis ELSE

 

Teresada’ arrive en courant à l’autre bout du chemin, Angel, sombre, la regarde fixement. Elle se fige.

ANGEL
Reprenez votre souffle, et trouvez le calme.

TERESADA
Qui êtes-vous?

ANGEL
Je suis celui qui pose les questions.

TERESADA
Quelle allure, quelle figure, quelle jeunesse! D’où venez-vous?

ANGEL
C’est moi qui pose les questions.

TERESADA
Dois-je encore subir un procès?

ANGEL
Contentez-vous de répondre.

TERESADA
Laissez-moi. J’ai trop parlé, trop écrit. Je suis fatiguée. (Temps. Il la regarde fixement).
Et puis, lisez mes livres après tout!

ANGEL
Il ne sert à rien de lutter contre ce qui doit être, vous le savez.

TERESADA
Qui êtes-vous? Je ne lutte pas… je suis vieille, desséchée. Je veux la paix.

ANGEL
“ L’obéissance donne des forces ”, c’est vous qui l’avez écrit.

TERESADA
Je n’ai rien écrit, tout m’a été dicté!

ANGEL
Donc, vous voyez, il vous ordonne d’écrire et… (Geste qui montre que ça vient tout seul).

TERESADA (elle l’interrompt)
Pas toujours directement… Par des intermédiaires aussi parfois il me parle.

ANGEL
Qui sont-ils?

TERESADA
Qui êtes-vous? Quelle tentation, quelle vision encore. (Elle sourit).
Votre calme m’offense. Je veux partir!

ANGEL (très doux)
Vous le pouvez, personne ne vous retient. (Temps. Teresada’ n’ose bouger.)

TERESADA
Qui m’a appelée? Est-ce un rêve? Pourquoi me justifier encore après tout ce temps?

J’ai tout dit déjà. Non? Que l’on consulte mes écrits! J’ai trop écrit, je le redis.

 

 

Louise Doutreligne : la tentation d'écrire

par François-Denis ELSE

 

 

"En sept tableaux, Louise Doutreligne investit la vie intérieure et extérieure de Teresa d'Avila… Elle nous donne à voir une FEMME d'hier dans son long cheminement, voué à l'ART POETIQUE… de dieu… la MYSTIQUE donc… et de l'écriture… ou inversement…

A 14 ans, elle dévore des romans de chevalerie. Son père ayant vent d'une amourette avec son cousin l'expédie au couvent… la grille tombe à 21 ans, l'aventure commence. A 26 ans au parloir de l'Incarnation on fait salon, on reçoit, on papote, on parle de Dieu et de mille autres choses. On la verra à 38 ans, chevalier de l'extase, un jour face à une croix, se rendre… lui seul… pour toujours, toujours, toujours.

A 45 ans elle fonde le couvent du silence et du jeûne, un modèle.

On verra la Madre Teresa avec ses filles jetée sur les routes plantant des couvents aux quatre coin de l'Espagne. Aux prises aussi avec les nobles mais soutenu par Gratian…

Enfin à 65 ans… "Une pauvre vieille"… Elle s'appuie fort sur sa canne et passe au Mythe… dans sa "transverbération".

Jean-Luc Paliès

 


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